Soraya

" l'identité assignée ne vaut pas grand-chose face à une identité soigneusement choisie"

J'ai longtemps cherché un port d'attache. Un endroit où je peux dire « nous » sans complexe. Même si j'ai passé la majeure partie de ma vie au Québec et que c'est le territoire auquel je m'identifie le plus, je me suis longtemps sentie imposteur de le déclarer mien. Je suis allée voir du côté de mes pays d'origine et j'ai ressenti le même malaise : au Maroc, on s’étonne de l’étrange combo que forment mon nom arabe et mon habit occidental et en France, on rit de mon accent. J'ai passé le début de ma vie d'adulte dans un flottement identitaire, je croyais qu'il me fallait m'ancrer quelque part pour ne pas dériver. Je voulais une culture d'appartenance, une communauté, une grande famille unie par le sang, par une histoire commune. Je sais maintenant qu'on a le pouvoir de se construire tout ça, où l'on veut. Que l'identité assignée ne vaut pas grand-chose face à une identité soigneusement choisie qui nous ressemble. En grandissant, je vois aussi de plus mon métissage comme une force, une richesse. Et aussi, j'ai de plus en plus l'impression que Montréal et les gens qui y habitent forment mon lieu d'appartenance. C'est ma ville, mon île, mon sanctuaire, mon chez-moi, loin d'être parfaite, mais aussi fièrement métisse, comme moi.